Fables livres VII VIII IX X et XI de Jean de La Fontaine
Ces trois-là, qui sont au programme de Français 2019-2021, m'ont particulièrement intéressée. Ces livres me paraissent, pour la plupart, destinées "aux grands", aux adultes bien plus qu'aux enfants par leur difficulté formelle et par les thèmes traités. Il m'a fallu relire trois fois la fable des devineresses (j'avoue) avant de saisir le demi-vers qui m'avait échappé pour comprendre l'ensemble, qui rendait la morale trop difficile ensuite. J'ajoute, au vu de la dédicataire, Mme de Montespan, que je soupçonne une forme d'avertissement à son égard pour sa passion pour l'occultisme, mais peut-être est-ce le hasard, peut-être La Fontaine a-t-il juste capté l'air du temps ?
De son propre aveu dans la "Préface", La Fontaine s'y inspire moins d'Esope et plus d'autres fabulistes qui, je l'avoue à ma grande honte, me sont inconnus comme Abstemius (mais, renseignement pris, je connaissais au moins son vrai nom, Lorenzo Bevilacqua) ou Pilpay (et son oeuvre, le Panchatantra, ne me disait strictement rien).
A ma grande surprise, il arrive à La Fontaine de ne pas seulement livrer sa morale mais de développer un argumentaire, ce que j'ai moins aimé mais pas détesté du tout.
Citations :
- "Cet homme, disent-ils, était planteur de choux si précieux
Et le voilà devenu Pape:
Ne le valons-nous pas ?" Vous valez cent fois mieux ;
La Fortune a-t-elle des yeux ?
Et puis la papauté vaut-elle ce qu'on quitte,
Le repos, le repos si précieux
Qu'on en faisait jadis le partage des Dieux ? ("L'homme qui court après la Fortune et l'homme qui l'attend")
-
Pour fournir aux projets que forme un seul esprit
Il faudrait quatre corps ; encor, loin d'y suffire,
À mi-chemin je crois que tous demeureraient :
Quatre Mathusalems bout à bout ne pourraient
Mettre à fin ce qu'un seul désire. ("Les deux Chiens et l'Âne mort")
- Car il faut, selon son système,
Qu l'homme, la Suris, le ver, enfin chacun
Aille puiser son âme en un trésor commun :
Toutes sont donc de même trempe ;
Mais, agissant diversement
Selon l'organe seulement,
L'une s'élève, et l'autre rampe. ("La Souris métamorphosée en fille")
- Un homme vit une Couleuvre.
Ah ! méchante, dit-il, je m'en vais faire une oeuvre
Agréable à tout l'univers.
A ces mots, l'animal pervers
(C'est le serpent que je veux dire
Et non l'homme : on pourrait aisément s'y tromper) (...). ("L'homme et la couleuvre")
- L'absence est aussi bien un remède à la haine
Qu'un appareil contre l'amour. ("Les deux perroquets, le roi et son fils", livre X)
- Peu s'en fallut que le soleil
Ne rebroussât d'horreur vers le manoir liquide.