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Mots et Images
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  • Ceci est le journal de mes films, de mes lectures, de mes spectacles et, parfois, des expositions où je vais, sans prétention à l'exhaustivité, à la science, ni à l'objectivité. La fusion avec over-blog a supprimé mes "liens amis" et je les prie de m'en excuser. Je suis la première ennuyée...
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13 mai 2012

Une Année chez les Français, de Fouad Laroui (2010)

annee-frMehdi, un écolier marocain de dix ans, a obtenu une bourse pour étudier au Lycée français de Casablanca. C'est un monde nouveau qui s'ouvre à lui, car, s'il parle peut-être mieux français qu'arabe, le français qu'il va découvrir, malmené, fait d'images, d'allusions, de citations cryptées ne l'aide pas à comprendre ni à communiquer.

Petit à petit, Mehdi va s'acclimater, grâce à ses bonnes notes, l'amitié de Denis qui a perdu son frère, le plaisir de l'art dramatique et la connaissance des adultes qui l'entourent et dont il perce peu à peu la folie.


Un roman qui prend du souffle et se charge en émotions diverses, sourires, attendrissements, larmes (j'avoue...) devant les tribulations de ce tout petit garçon dans la petite France multiculturelle qu'est ce Lycée français de 1969 avec, pour tout viatique, les lectures enchantées du passé et du présent, et les récurrentes références aux romans de la comtesse de Ségur, qui détonnent autant qu'elles font sens.

Au début, je tiquais surtout sur ce qui me paraissait être des invraisemblances : comment un enfant aussi "à côté de la plaque" (il semble maîtriser assez mal le vocabulaire) peut-il avoir eu une bourse et se révéler être le meilleur élève du cours de français ? En réalité, complètement paralysé par la hchouma, sorte de pudeur, de honte, il est à 20 % de ses capacités une grande partie du livre et c'est quand il commence à s'en affranchir un peu et se déploie qu'on le comprend. Et les adultes semblent tous mahboul ! Une mention spéciale aux "pions" !

Sa solitude, assez mystérieuse par instant, touche très profondément d'autant qu'elle s'accompagne de dénuement, de carences matérielles ; on découvre que cette culture française le sépare peu à peu de sa famille, mais que le processus était enclenché bien avant d'entrer au Lycée : le fait de ne pas embrasser sa soeur en la quittant le frustre un peu quand il pense aux adieux fraternels chez la comtesse de Ségur. Je ne peux m'empêcher de penser à tous ces enfants qui ont pu s'instruire grâce à l'école républicaine (ce dont étaient très conscients leurs maîtres, fort militants) et qui ne le peuvent plus guère aujourd'hui.

Je ne dois pas oublier de dire qu'il y a aussi beaucoup d'humour, et ce n'est pas si fréquent dans ce genre de récits.

Citations :

  • "Voilà. (Geste) Tous ces noms, ce sont des anciens du lycée, des profs ou des élèves, il y en a exactement cent trois, qui sont tombés pendant la guerre, pour défendre leur patrie : la France. (...) Dulce et decorum est pro patria mori. C'est du latin, c'est dans une ode d'Horace. Vous comprenez le latin ? C'est pas grave, vous en ferez cette année. Belle langue, le latin... Mais morte, hélas, morte, dead, kaputt, comme tous ces braves (...). Vous remarquerez que le premier est "Ahmed, Lucien" (...) on ne pouvait rêver meilleur nom pour mener un cortège funèbre franco-marocain. Un programme à lui tout seul ! La fraternité d'armes incarnée dans un nom (Songeur.)
  • - Je suis le seul étudiant français en fac de droit, ici. C'est un suicide social, m'a dit Morel, l'autre jour. Il ne comprend pas que je ne sois pas allé en France poursuivre mes études, après le bac. "Un suicide social" ! Tu connais Morel ? C'est un con, doublé d'un vantard, triplé d'un... d'un...
    Il n'arrivait pas à trouver la troisième insulte. Contrarié, il résuma, d'un seul mot :
    - C'est un pied-noir ! (...) Remarque, mon père aussi était pied-noir.
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