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1 avril 2021

Le Successeur de pierre, de Jean-Pierre Truong (1999)

51N61NKP8HLUne incroyable coïncidence a mis sur ma pàl un roman de 1999 qui parle de notre présent pandémique et cloîtré. Impressionnant que j'aie commencé à le lire juste maintenant.

C'est un roman policier de science-fiction où l'on suit, grâce à des coupures historiques allant des débuts de l'ère chrétienne (l'influence supposé de l'hérésie de Nestorius sur la hiérarchie vaticane) aux années 30 puis dans une uchronie supposant au troisième millénaire une grande pandémie aboutissant à la mise dans des cocons de l'humanité. Toute ? Non, un petit noyau d'individus, les Imbus, continue à aller et venir, et à "se sacrifier" pour gouverner tout cela, et des NoPlugs vivent tenus par une Ethique de l'individualisme hors des cocons.

On suit aussi un groupe d'amis qui vivent dans une réalité virtuelle aménagée pour leur donner l'impression d'une cohabitation, mais en réalité, tous se cachent beaucoup de choses et Calvin, le plus jeune, traceur numérique émérite, se met en devoir de chercher leurs véritables identités.

C'est peu de dire que j'ai adoré ce roman, au-delà de son caractère visionnaire, de sa portée politique et sociale, scientifique, la construction narrative au suspense insoutenable, aux multiples fragments dont on se demande presque jusqu'au bout comment ils vont pouvoir se rassembler et s'imbriquer, en font un récit magistralement composé et riche.

Citations :

  • Au demeurant, l'Occident n'avait pas attendu la Peste pour s'encoconner. Zéro Contact parachevait un mouvement amorcé dans la seconde moitié du vingtième siècle, à l'avènement des moyens de communication de masse. Ce siècle paradoxal avait présidé à l'extrême interconnexion des individus en même temps qu'à leur extrême isolement. L'industrie de la communication y avait connu un développement parallèle à celle du blindage. Le Web avait encore accéléré cette tendance à la réclusion. La Peste fut donc l'occasion d'institutionnaliser un confinement déjà largement passé dans les mœurs. Les gosses hallucinés des années 1990, soudés six heures par jour à leurs consoles vidéo, accueillirent les cocons, vingt ans après, comme une évolution naturelle : ils n'étaient, somme toute, que la concrétisation d'un vieux rêve, l'immersion totale dans un monde virtuel, hors d'atteinte des vicissitudes du réel.
  • Désigner un coupable était la règle d'or de la gestion des crises. Réfléchir était facultatif et ne venait en tout état de cause qu'ensuite. Un bon coupable, convenablement diabolisé, dispensait même de chercher les véritables causes d'un problème !
  • Pourtant, que j'aurais donné pour revoir un véritable horizon ! Le regard, vois-tu, est comme un pur-sang à qui l'on donne carrière : il aspire à galoper. Rien ne lui est plus contraire qu'un mur... fût-il multimédia ! (...) Tu ne sais pas ce que c'est qu'un horizon, fût-il celui de ton home-trainer... Ah ! Puisses-tu un jour ressentir la joie qui s'empare de toi quand l'oeil, affranchi de la tyrannie des objets proches, s'épanche librement dans l'infini.
  • La tentation du développement séparé a de tous temps hanté les civilisations riches. Que ce soit par l'institution de ghettos, de quartiers périphériques, de "villes nouvelles" ou par la fermeture de frontières aux indésirables, les nantis ont toujours souhaité tenir les gueux à distance. Cet idéal, la Grande Peste allait leur fournir l'occasion de le porter à son comble.
    Par les coupes claires qu'il pratiqua dans la population, le fléau dilacéra le tissu social et disloqua les anciennes solidarités au point d'annihiler toute résistance. A de rares exceptions - comme l'émeute de 2011 à Paris - les Imbus n'eurent aucune peine à convaincre les rescapés, sous prétexte de protection bactériologique, de s'enfermer dans les pyramides pour y pratiquer avec dévotion la nouvelle religion : Zéro Contact.

 

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