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Mots et Images
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  • Ceci est le journal de mes films, de mes lectures, de mes spectacles et, parfois, des expositions où je vais, sans prétention à l'exhaustivité, à la science, ni à l'objectivité. La fusion avec over-blog a supprimé mes "liens amis" et je les prie de m'en excuser. Je suis la première ennuyée...
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14 septembre 2022

Cher Connard, de Virginie Despentes (2022)

phpa7issI Never judge a book by its cover. Et maintenant, il va falloir faire fi des critiques. Le titre outrancier - Baise-moi ne les avait pas préparés, sans doute - semble avoir suffi à certains, l'autrice féministe à succès sans doute aussi, pour décider que le livre entier était intolérable aux bons becs de la littérature. C'est dommage, car c'est, selon moi, tout le contraire. Certes, les trois personnages dont on a les messages (courriels et billets de blog font le nouveau roman épistolaire) sont haut-en-couleur, un écrivain alcoolique et toxicomane issu d'un milieu pauvre et qui, au cours de ses extases chimiques, se croit tout-puissant, amoureux transi mais piteux à jeun, qui relève de #metoo, selon sa victime ; une actrice d'âge mûr et iconoclaste, qui fut d'une beauté spectaculaire (j'imagine facilement Béatrice Dalle dans le rôle, le jour où il sera porté à l'écran) ; une victime vindicative du premier à qui il ne reste plus que les tribunes d'internet pour chercher à tâtons sa justice. Les deux premiers, en échangeant, en contrepoint, aboutissent comme le veut le genre musical, à des convergences inattendues, nuancent et rectifient leurs position. Ils évoluent en humains et non en créatures artificielles et cela sonne vrai. Élément du décor, la toxicomanie analysée, psychanalysée parfois, prend de l'importance et devient instrument de narration ; sa sincérité, les mises-à-nu qu'elle opère et qui m'a beaucoup appris, à moi qui croyais tout en savoir, en toute immodestie...

Mais au lieu d'asséner ses propres certitudes sur ces sujets, l'autrice traduit les diverses épiphanies de ses personnages, comment ils touchent leur addiction et tâchent de l'apprivoiser, en chemin vers l'illusoire maîtrise absolue du temps, de son corps, de ses blessures. Bref, elle s'efface derrière son, ses sujets, là où les critiques croient la boxer directement.

J'ai beaucoup aimé ce roman et j'en veux beaucoup au tam-tam méprisant de m'en avoir fait craindre la lecture. Virginie Despentes est un véritable écrivain

Citations :

  • Le gangsta rap, c'est la performance du pouvoir par ceux qu'il a écrasés (...).
  • Ces derniers temps, je perds des amis comme on perd ses cheveux, par poignées. Je n'avais pas réalisé à quel point mes intimes sont tous des gens avec qui je bois, ou avec qui je tape. J'élimine le produit et on est juste gênés de se voir.
  • Autour de moi, cependant, personne n'a jamais oublié de préciser que je suis un fils d'ouvrier. Ça fait dix ans que je publie des livres. Tu le trouveras dans tous les articles qui parlent de mes romans. Et l'information n'est pas "il est arrivé là où il en est à la seule force du talent" mais bien "il n'est pas du sérail, n'est-il pas exotique ?" Et on me demande souvent d'un air gourmand "mais vous vous êtes embourgeoisé, n'est-ce pas ?" J'ignore pourquoi le journaliste la prononce toujours sur le ton mi-triomphant mi-inquisiteur de la question-piège. (...) [O]n me frotte le nez dans la merde en ricanant "tu vois que t'aimes ça, le luxe, salope de pauvre". Je l'aime bien, leur luxe mais j'ai toujours l'impression qu'ils ont besoin de vérifier encore et encore qu'ils font envie au reste du monde.
  • Mais bien sûr, quand on obéit à la drogue, c'est à la parole du parrain qu'on obéit. A la parole du banquier qui fait du blanchiment d'argent. On devient l'employé d'un système parallèle au sommet duquel, en vérité, c'est toujours à la même masculinité qu'on se soumet. D'une pure démonstration de violence à l'autre, c'est toujours la même connerie qui finit par nous écraser.
  • Elle m'a raconté son Weinstein (...). J'ai dit je suis désolée, elle m'a demandé si j'avais eu ce genre de surprise j'ai répondu "non, trente ans de métier et je n'ai jamais eu de problème." Elle a dit "ça ne m'étonne pas. Tu sors avec des mecs qui font vraiment peur." Je n'y avais pas pensé comme ça (...). Mais elle a raison. Mes gars sont toujours des gangsters et nul n'a envie de se faire péter les deux genoux.
  • C'est un grand garçon, je pense qu'il a le même âge que moi. Voilà, ta mère ne t'aimait pas - on ne peut pas passer des vies entières à ressasser nos enfances ratées. Habitue-toi. Fais pas chier.
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Commentaires
D
Paul B. Preciado : https://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_B._Preciado<br /> <br /> Parmi les textes de VD que je connais j'ai oublié de citer "On se lève et on se casse" (bof), quant à King Kong théorie, les extraits que tu en donnes m'ont laaaargement suffi…<br /> <br /> (J'avais tenté de te répondre plus tôt, mais pas moyen d'enregistrer mon commentaire depuis mon téléphone.)
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D
Je ne connais d'elle que quelques entretiens lus, vus ou écoutés, et son article au lendemain des attentats de janvier 2015. J'étais assez attirée par Vernon Subutex mais j'hésitais à me le procurer. J'ai donc été plutôt contente qu'une série en soit tirée, avec Romain Duris qui plus est, mais j'ai vite déchanté et j'ai abandonné au deuxième épisode tant j'ai trouvé le personnage insupportable. Et en fait elle aussi, je la trouve assez insupportable. Quant à son ex, qui chronique régulièrement dans Libé, n'en parlons pas…
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