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Mots et Images
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  • Ceci est le journal de mes films, de mes lectures, de mes spectacles et, parfois, des expositions où je vais, sans prétention à l'exhaustivité, à la science, ni à l'objectivité. La fusion avec over-blog a supprimé mes "liens amis" et je les prie de m'en excuser. Je suis la première ennuyée...
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18 mars 2023

J'ai rêvé la Révolution, de Catherine Anne (2018)

9782330093471Olympe de Gouges, "la prisonnière", est enfermée en prison en attendant son procès, et surnomme ironiquement le jeune soldat hostile, parfois haineux, qui la garde : "mon ange gardien". La mère de ce garde se prend d'intérêt pour elle et, entre crainte pour son fils et désir d'être agréable à la prisonnière, tâche d'adoucir sa détention. Le fils de la prisonnière étant à la guerre à l'étranger, c'est sa belle-fille qui tente d'abord de faire évader sa belle-mère, prétendant ne faire passer qu'un colis à Olympe de Gouges... La réaction de la prisonnière sera d'un naïf socratisme : on fait confiance à la justice de sa patrie.


J'ai des sentiments très mitigés par rapport à cette pièce. On peut certes avoir de la sympathie pour tous les personnages, car on pénètre bien leurs ressorts, sans qu'il y ait besoin de grands débordements verbaux et j'estime le parcours audacieux et talentueux, le courage et l'ouverture d'esprit de la véritable Olympe de Gouges qui, rapprochée de la détention angoissée de l'héroïne de la pièce, touchent forcément. Mais c'est dans la façon que l'autrice a de présenter la faction des Girondins et leur sectatrice féministe comme le bon camp, aucunement défini, d'aucune manière que ce soit, sur lequel on peut projeter en creux toutes les vertus et toutes les modérations (eux n'auraient exécuté personne, eux auraient dialogué et respecté le droit, eux seraient féministes, puisqu'Olympe était parmi eux : elle ne le dit pas mais le laisse croire) que je suis réservée. Et elle est bien sûr sans reproche. Je suis d'accord pour dire qu'elle avait parfaitement le droit de préférer une monarchie parlementaire (ce point n'est jamais abordé dans le texte), et le dire sans encourir une exécution ni l'accusation de traîtrise, encore moins sans procès équitable, mais c'est bien pour cela qu'elle est enfermée, pas pour son combat féministe. Or qu'il n'est guère question que de celui-là dans le texte, ce qui laisse croire que c'est uniquement pour cette raison qu'elle a été exécutée. Je suppose qu'il faut considérer, d'autant que le nom d'Olympe de Gouges n'est donné qu'à la fin de la pièce, qu'il ne s'agit pas d'une "pièce historique" mais que Catherine Anne désire donner un caractère intemporel à son intrigue, en ne se concentrant que sur un féminisme lui-même pratiquement décontextualisé, qui pourrait être celui d'une militante iranienne ou afghane.

J'ai détesté l'affectation stylistique qui a consisté à abolir la ponctuation, pour payer son tribut à la modernité. Il n'y avait pourtant pas mille façons de prononcer certaines répliques et le fait de devoir s'arrêter pour s'en demander le ton (le reste de la syntaxe parfois approximative n'aidait guère) laissait la place à des moments un peu dévitalisés, mornes.

Même si le coup de la voix dans la tête, qui cite des extraits d'oeuvres d'Olympe de Gouges, est assez artificiel et n'a rien de nouveau, en tant qu'enseignante, j'en vois le grand intérêt pour une lecture ou un spectacle destiné aux élèves (la Déclaration des Droits de la Femme et de la Citoyenne est encore au programme du Bac cette année), pour qu'ils ne voient pas là qu'une histoire de femme incarcérée et qui est traitée injustement. L'émotion et l'intérêt croissent à la toute fin de la pièce avec le pathétique, se doublent d'un tableau affreux de la peine de mort. La mise en abyme de la toute-fin ajoute à l'intensité littéraire des dernières pages.

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