Brûlée vive, Souad (2003)
Souad vit en Cisjordanie, un des pays où l'on paie chaque jour le crime d'être née femme par la privation de sa liberté et de sa dignité, et où on en souffre dans sa chair.
Depuis toute petite, elle subit de mauvais traitements, n'est pas scolarisée, vit dans la hantise d'être traitée de "charmuta" (prostituée) chaque fois qu'elle s'habillerait ou se tiendrait comme elle en aurait envie. Elle assiste aux infanticides sur les bébés qui sont ses sœurs, aux assassinats des charmuta, aux violences diverses et variées qui sont commises sur les femmes, et ne se révolte pas. Tout au plus parvient-elle à ressentir de la haine pour son père et à espérer qu'un mari l'arrache à tout cela : on gagne une petite liberté à être mariée. Rien de bien folichon, mais tout est mieux que d'être fille chez son père.
Voilà qu'un jeune voisin, Faiez, la demande en mariage. Cette demande a beau être repoussée par le père (il faut marier une sœur plus âgée avant elle), ce que cet espoir fait naître en elle crée également de la curiosité puis de l'amour pour le prétendant. Ce dernier finit par se rendre compte de l'intérêt qu'il a éveillé, et en profite sans scrupules lors de leurs rendez-vous secrets. Souad se retrouve enceinte et presse son prétendant de renouveler sa demande en mariage ; effrayé à l'idée du père de Souad, il s'enfuit, sachant pertinemment qu'il la condamne en faisant cela. Pendant ce temps-là, la famille se doute de quelque chose et un jour, Souad découvre que le conseil de famille lui réserve le châtiment adéquat aux femmes qui déshonorent leur famille : la mort...
Comme le titre l'indique, elle sera arrosée d'essence et immolée. Transportée mourante dans un hôpital, elle n'y rencontrera aucune compassion de la part du personnel soignant, mais Jacqueline, représentante de "Terre des Hommes", passe par là...
Il y a longtemps que je ne me fais plus d'illusions sur le genre humain, et que je trouve que le qualificatif "humain" pour quelqu'un qui a de la bonté, de la tolérance, de l'altruisme, est une antithèse ou un oxymore d'une triste drôlerie.
Je reste quand même choquée qu'on puisse encore juger (sur de soi-disant préceptes religieux alors que le message religieux du Coran, puisqu'il s'agit de lui, pourrait être lu également dans une optique de paix : pourquoi n'en retenir que le pire et délaisser le reste ?) pertinent de placer son honneur dans la culotte ou le slip de quelqu'un. Sa place prédestinée n'est-elle pas un peu plus haut, si l'honneur est quelque chose d'élevé ? Que ce genre de choses puisse peiner un parent, éventuellement le fâcher, soit. Mais le déshonorer ?...
La vie que menaient, et que mènent encore, certaines femmes est un scandale criant, qui exigerait une intervention humanitaire (pouf-pouf), un grand Débarquement, comme en 1944, pour sauver des êtres humains souffrant, mourant pour des préjugés. Mais voilà, tout se passe dans l'indifférence mondiale complète : comment essayer de sauver la moitié de l'humanité ? Ce qui devrait en faire une cause de lutte humanitaire prioritaire devient, par son caractère répandu, une norme, une sorte de tradition. D'ailleurs, quand on évoque le sort des "petites filles afghanes" (pourquoi le pathétique ne suit-il pas les femmes adultes ? pourquoi les viols, les maltraitances, les mutilations, etc. n'entraînent-ils l'indignation que commis sur des petites filles ?), c'est pour les abandonner au profit de la vraie cause du conflit, qui est strictement géo-politique, pour ne pas dire économique.
Et le plus aberrant, c'est que cette violence faite aux femmes perdure grâce aux femmes elles-mêmes, puisqu'on n'imagine pas, avec la force numérique que nous représentons, qu'il serait possible de nous imposer réellement quelque chose sans "notre" propre consentement...