Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Mots et Images
Mots et Images
Derniers commentaires
Newsletter
7 novembre 2010

Antigone, de Sophocle (442 avant J.-C.)

sophocle_tragEtéocle et Polynice, les fils d'Oedipe, se sont entretués dans une bataille dont l'enjeu devait être la prise de la ville de Thèbes (cf. résumé Wikipédia de Sept contre Thèbes, d'Eschyle, en attendant que je lise et résume moi-même cette tragédie). Leur oncle Créon, désormais roi de Thèbes, décrète les hommages funèbres de la cité à Etéocle, le "bon" frère selon les critères légaux, et ordonne qu'on laisse pourrir à l'air libre Polynice, coupable de rébellion à l'autorité humaine. C'est une façon, comme c'est dit dans la pièce, de le "faire mourir deux fois", puisque selon les Grecs anciens, un cadavre sans sépulture ni cérémonie d'enterrement est privé d'éternité, dans tous les sens du terme.

Antigone, leur sœur, va vouloir réparer cet injuste arrêt, qui est contraire aux lois divines. Elle tente de convaincre Ismène, l'aînée de la fratrie, de l'accompagner, mais celle-ci n'a pas le courage d'enfreindre l'arrêt de Créon. Antigone va donc ensevelir seule son frère et se fait arrêter tout aussitôt. Créon, défié ouvertement par la coupable, doit la condamner à mort, malgré l'inévitable chagrin de son fils Hémon, promis à Antigone. Cette dernière sera emmurée dans une caverne, afin que son sang ne retombe pas sur les Thébains. Créon prétend, avec une hypocrisie de mécréant, qui va se retourner contre lui, qu'il faut qu'elle reste en vie pour que les dieux d'en bas décident eux-mêmes de la sauver ou de la laisser mourir...


antigone_sophoclesLe débat qui oppose Ismène et Antigone est un dilemme sur le rôle de la femme en Grèce antique : la première se souvient du devoir de soumission aux hommes, la seconde sait que si l'homme est diurne (monde extérieur à la maison, travail, politique, devoirs civiques, Vie...), la femme est nocturne (intérieur de la maison, devoirs domestiques, intendance et éducation, devoirs religieux, Mort...) et qu'il lui appartient de rendre les devoirs funèbres à son frère condamné.
Cette tragédie archi-connue de tous les jeunes Français, puisqu'elle est massivement étudiée dans les classes de 3ème (facile à lire et plébiscitée par l'âge de la rébellion) dans la version composée par Anouilh, a une dimension plus simple et plus grave ici.
Antigone, chez Sophocle, est à la fois plus déterminée et consciente d'avoir raison contre Créon, et plus sympathique que chez Anouilh. Rien d'adolescent dans sa révolte : Créon n'a aucune raison valable, en dehors d'une loi établie par lui-même et qui découle d'une situation politique elle-même peu claire, à lui opposer, donc elle s'en tient à la volonté divine : on enterre un mort selon les rites, qui qu'il soit. Créon, chez Anouilh, a de très bonnes raisons à donner à Antigone ; humain, décidé à la sauver, c'est lui qui a un fort capital de sympathie. Chez Sophocle, il a une raison supplémentaire d'être odieux au lecteur du XXIème siècle : l'argument misogyne qu'il rabâche à trois reprises, pour la bonne raison que c'est tout ce qu'il trouve : son fils, qui défend Antigone avec des arguments censés, se fait manœuvrer par une femme, hou...

Citations :

  • Ne dois-je pas plus longtemps plaire à ceux d'en bas qu'à ceux d'ici, puisque aussi bien c'est là-bas qu'à jamais je reposerai ? (Antigone)

  • Rends-toi compte d'abord que nous ne sommes que des femmes : la nature ne nous a pas faites pour lutter contre des hommes ; ensuite que nous sommes soumises à des maîtres, dès lors contraintes d'observer leurs ordres - et ceux-là et de plus durs encore... (Ismène)

  • Pour moi, en tout cas, je supplie les morts sous la terre de m'être indulgents, puisqu'en fait, je cède à la force : mais j'entends obéir aux pouvoirs établis. Les gestes vains sont des sottises. (Ismène)

  • Hélas ! il m'en coûte mais je renonce à ma résolution. On se bat sans espoir contre le Destin. (Créon)
  • Lorsqu'un homme doit renoncer à ce qui faisait sa joie, je tiens qu'il ne vit plus ; ce n'est plus à mes yeux qu'un cadavre qui marche. Va, enrichis-toi, à ton gré, largement ; va vis dans le décor des rois : si le contentement n'y trouve pas sa place, je n'en donnerais pas l'ombre d'une fumée. (Le Messager)

Publicité
Commentaires
Publicité
Archives
Publicité