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23 février 2011

L'Homme de Kaboul, de Cédric BANNEL (2011)

homme_kaboul001En Suisse et en Afghanistan se produisent simultanément deux disparitions qui mettent en émoi (sans effusion médiatique) des enquêteurs bien différents.

A Berne, un certain Léonard, directeur financier de Willard Consulting, disparaît du jour au lendemain et l'Entité, un organisme d'enquêteurs plus ou moins barbouzes, tente de le retrouver, avec l'aide de Nick Snee, un talentueux et jeune analyste qui semble mal à l'aise avec certains membres et certaines méthodes de ceux qui l'emploient.

A Kaboul, c'est d'une disparition plus radicale qu'il s'agit : Wali Wadi, un intermédiaire plutôt piteux, se suicide. Oussama Kandar, commandant en chef de brigade est envoyé sur les lieux et a la désagréable surprise, outre de constater qu'un de ses compatriotes ait eu la scabreuse fantaisie de se suicider dans un pays où il est si facile de mourir par la main d'autrui, de voir également que l'affaire intéresse le Ministère de la Sécurité et qu'on lui conseille vivement de ne pas voir autre chose qu'un suicide et de classer rapidement l'affaire. Oussama ne l'entend pas de cette oreille et va commencer par vérifier l'essentiel : y a-t-il de la poudre sur la main de Wali Wadi ?...

Emmenés des ruelles de Kaboul aux squats nauséabonds de Berne, des bureaux luxueux de Suisse aux routes de montagnes infestées de talibans, nous pressentons un lien entre les deux affaires. Quel est-il ?


La vérité est que les romans d'espionnage n'ont jamais été mon fort, mais j'avoue avoir été captivée par l'histoire qui l'emmène très vite plutôt sur le terrain du thriller.

D'abord, c'est le biais de l'exploration d'un pays étranger comme l'Afghanistan, qui m'a souvent fascinée, mais que la télévision ou même des livres documentaires n'abordent que par le biais de l'événementiel ou le sensationnel : nous vivons ici le quotidien d'un commandant de brigade et devinons celui des autres. C'est impressionnant et permet d'avoir une lecture plus complète des attentats dont nous parlent brièvement les journaux ou des implications réelles de la présence de la Coalition sur place, du fait que ses soldats sont pris comme cibles, etc. J'ai mieux compris combien l'appartenance ou non à une ethnie pouvait être lourde de conséquences pour simplement se rendre d'un lieu à un autre.

afghanistan

 

De plus, Oussama est un personnage sympathique et convaincant, auquel ses séjours en Russie du temps de l'occupation ont permis de connaître la relativité des croyances et des usages, ce qui le rend tolérant et notamment avec sa femme, féministe convaincue (la bêtise gynophobe - car on a dépassé depuis longtemps la misogynie dans ce pays - m'empêchera longtemps de partir là-bas). Il n'en est pas moins musulman pratiquant et sincère mais désapprouvant les dérives des talibans ignares du type mollah Omar sans paraître pour autant calibré pour plaire à un lecteur occidental.

Ensuite, même si, au début, c'est quelque chose qui a failli me faire décrocher (j'aime comprendre vite, mea culpa), le suspense portant sur le lien entre les deux affaires se maintient jusqu'à la fin, avec une virtuosité indéniable, puisque l'auteur ni triche pas et nous livre de nouveaux éléments très régulièrement et construit devant nous les vies des deux disparus, les circonstances de leur disparition, tout en nous intéressant aux rebondissements haletants, toujours plus spectaculaires, parfois sanglants, des enquêtes de Nick et Oussama.

Pour finir, je dirai que je trouve que Cédric Bannel a un vrai talent pour nous faire figurer les lieux, les personnages, créer une atmosphère ce qui rend le roman très "cinématographique" et, certainement, transposable au cinéma.

Je souhaite à ce roman, qui sort dans quelques jours, la bonne fortune qu'il mérite et je remercie les éditions Robert Laffont de m'avoir permis de le lire en avant-première tout en me laissant la liberté d'en écrire ce que je voulais.

Citations :

- Rétabli l'ordre en réduisant en esclavage les femmes et en ramenant le pays à l'âge de pierre..., répliqua Nick cinglant.
- Ce pays vivait déjà à l'âge de pierre avant que nous y prenions le pouvoir... Depuis que l'empereur Moghol Babur en a été chassé, soit très exactement au XVème siècle de votre calendrier impie. Quant aux excès de notre régime, c'est une révolution... et toutes les révolutions ont leurs excès.
- Pas autant que la vôtre !
- La nôtre a été l'une des moins sanglantes des derniers siècles. Pensez aux Français. Aux trente ou quarante millions de morts de la Révolution culturelle chinoise. Cela n'empêche pas vos gouvernements d'accueillir les dirigeants chinois avec tous les honneurs. Pourtant, les hommes au pouvoir au Chine aujourd'hui sont-ils radicalement différents de ceux d'il y a quarante ans ? Non. Étudiez donc l'Histoire, que vous ignorez, jeune homme, et évitez-moi les discours moralisateurs et simplistes. Ce n'est pas parce que je porte un turban que je suis borné. Les choses sont toujours plus compliquées qu'elles ne semblent l'être, dans ce monde cruel et multipolaire, comme le disent les commentateurs occidentaux...
(p. 339)

Mon billet sur le blog du roman.

Blog du roman (renseignements sur l'auteur, bandes-annonces...)

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Commentaires
M
Ce livre a le mérite de poser un regard plus juste alors sur ce pays...
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