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Mots et Images
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  • Ceci est le journal de mes films, de mes lectures, de mes spectacles et, parfois, des expositions où je vais, sans prétention à l'exhaustivité, à la science, ni à l'objectivité. La fusion avec over-blog a supprimé mes "liens amis" et je les prie de m'en excuser. Je suis la première ennuyée...
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23 septembre 2023

Vieille fille, de Marie Kock (2023)

61vBobUGMMLL'autrice expose, à travers une confession parfois très touchante des épisodes tragiques de sa vie, d'une façon symétriquement souriante le bien-fondé de son célibat et le confort qu'elle y trouve. Elle dénonce aussi la façon péjorative dont son célibat prolongé est qualifié de "vieille fille" dans la mesure où elle n'a pas même brièvement connu l'état de couple qui l'aurait faite mère.

Tout en étant touchée, disais-je, je dirais que la confession finale qu'elle fait d'un deuil douloureux et impossible à faire, élève ce célibat à l'égal d'une conséquence pathologique : cela affaiblit sa démonstration qu'il serait tout à fait sain. J'en arrive alors incoerciblement à penser que ce célibat n'est pas enviable, qu'il occupe la place du bonheur qu'elle a perdu dans sa prime jeunesse, qu'il est palliatif.

Elle va cependant ensuite se lancer dans la thèse d'une récupération d'une sorte d'énergie jungienne, de sensualité, de maternité plus vastes qu'embrasseraient les célibataires, mais pour moi, elle a plombé sa démonstration : on a plus de mal à voir cela comme un vrai choix mais la création de nouvelle voie qu'induit une maladie, un handicap.

C'est malgré cela une lecture intéressante et dont l'humanité parlera à tous, quelle que soit leur expérience.

Citations :

  • La majeure partie de ma vie s'est organisée, quelles que soient mes obligations professionnelles, autour de la recherche de l'autre. Dans cette période, la rencontre, la relation avec un homme, la passion, le drama parfois, la peau d'un autre, c'est tout ce qui me fait sentir vivante. C'est là où se nichent l'excitation, la joie, l'intensité, le sentiment d'avancer. J'y crois avec une telle ferveur que je me relance dans la course après chaque échec, comme on prendrait une nouvelle bretelle d'autoroute, pleine d'excitation anticipée d'accélérer (...) Mais j'ai beau y mettre toute mon énergie, tous mes espoirs, je ne passe jamais la barrière des deux ans.
  • Tout occupée à tendre mollement vers un horizon que je crois naturel et à me demander ce qui ne va pas chez moi pour ne pas recevoir ce cadeau que la vie semble offrir à pleines mains aux autres, je regarde monter la jauge de mon âge.
  • Plutôt que de laisser Léana [de la Villa des Coeurs brisés] tranquille avec sa vie qui a l'air finalement de plutôt lui convenir, on lui fait porter des sacs de sable pour lui prouver que toute seule elle n'y arrive pas, alors qu'à deux, la charge est plus légère et qu'avancer est possible. L'exercice est révélateur parce que c'est bien comme cela que nous est présentée la vie à deux ou à plusieurs quand il s'agit d'une famille : un moyen de partager la charge et de rendre la vie plus douce. Sans jamais poser l'hypothèse que l'on n'est peut-être pas obligé de porter des sacs de sable.
  • Mon frère me dit que je n'ai plus jamais souri comme avant et il a raison. Il y a quelque chose qui s'est brisé et que rien ne pourra réparer, quels que soient les discours sur le deuil et la résilience. Ce que j'ai perdu, au-delà de lui, est impossible à quantifier, à lister, à circonscrire. Mais dedans, il y a l'innocence. (...) En 1997, j'ai perdu l'idée que l'amour était quelque chose de naturel, de donné, de normal.
  • J'ai compris qu'au travail, ce n'est jamais qu'une question de travail. Je me suis mise à observer comment certains traînaient au boulot simplement pour ne pas retrouver ce qui les attendait à la maison. Comment d'autres y voyaient un terrain de jeu pour y rejouer leurs petites névroses personnelles.
  • Je suis désormais atrocement gênée quand j'entends ces phrases toutes faites de personnes qui ont la gagne, qui ne sont là ni pour participer, ni pour passer un bon moment, ni pour se faire des amis. Je me méfie des histoires d'ascension et de revanche. De ceux et celles qui abordent leur carrière professionnelle comme un jeu d'échecs, avec des coups à faire et à anticiper. J'ai appris à refuser les promotions pour la promotion, les salaires qui vous coûtent trop cher, les réunions qui ne servent qu'à mettre en scène le travail et non à le faire. J'essaie de sortir des mécanismes de récompense, tangibles ou symboliques, de travailler de la même manière que je fais la vaisselle. Pour y voir un peu plus clair. Pour la beauté du geste. Pour le plaisir de l'effort. Pour que cela ressemble tous les jours un peu plus à cette scène du film Witness, où Harrison Ford se retrouve chez des Amish à participer à la construction d'une grange pour un couple de jeunes mariés : en s'y mettant tous, en venant avec leurs outils, ils arrivent à plier le boulot en une journée, avant de retourner à leurs tâches respectives en sifflotant.
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