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17 janvier 2010

Mars, de Fritz ZORN (1976)

marsFritz Zorn écrit ce livre au moment où, rongé par les métastases de son cancer, son lymphome, il met un point final à sa psychanalyse et donne un sens social, religieux et politique à sa maladie.

"J'ai été éduqué à mort", répète-t-il. De son vrai patronyme, "Angst" (peur) il va se tourner vers le colère : "Zorn". De quel droit peut-on, sous prétexte de tranquillité, de convenances, d'harmonie dans sa propre vie, éradiquer toute vie de ses enfants ? Et Dieu ? Comment tolérer la soumission bêlante de Job devant le Dieu qui inventa les crocodiles, la menace, la mort et, comme lui, l'en remercier ? Pour Zorn, autant le remercier d'avoir inventé la Gestapo, et accepter enfin que le monde soit régi par le mal.

De gentil, trop sage, chaste à vie, sans aucune relation véritable avec qui que ce soit, Zorn s'est tourné vers la révolte, et avec lui, souhaite que meure la bourgeoise qui permet qu'on éduque ainsi les enfants, meure la religion chrétienne qui a donné la morale mortifère, que meure l'Occident tout entier, d'être le sarcome de Dieu, et que celui-ci se réveille la nuit en hurlant sa douleur.


Difficile à lire sans être bouleversé. Au début, j'ai détesté le récit que je trouvais geignard, et un peu facile cette mise en cause parentale, sans mise en cause de soi-même : on ne peut être à vie victime de son éducation. Plus encore, le style, qui n'était pas sans me rappeler Elfriede Jelinek ou Bernhardt, que je déteste, avec leurs infinies variations aphoristiques qui seraient du Bach, en plus abrutissant, et les chiasmes à répétition, m'avait indisposée... Puis le style prend de la respiration, et, avec la révolte et l'élévation au niveau de la réflexion philosophique, j'ai été happée.

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Commentaires
D
Merci de cet intéressant message et de la citation (que j'avais complèmement oubliée).<br /> Les éducations qui laminent les uns ne font pas broncher les autres. C'est intéressant de se dire que c'est peut-être l'échec du déterminisme !
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I
J'ai retrouvé le passage unique du livre où Fritz évoque son frère (page 36 dans l'édition Gallimard) et après relecture on peut supposer que ce dernier a franchi sans trop de problèmes son éducation : <br /> "...Le premier disque que j'achetai avec mon argent de poche fut donc quelque-chose de tout à fait classique et "bien" - sans doute un ennuyeux morceau de Mozart ou Beethoven - aussi étais-je très fier de mon "bon" achat. Le premier disque que mon frère, mon cadet de trois ans, se procura peu après avec ses éconmies était le "Tango criminel" très populaire à l'époque. Le choix de mon petit frère me faisait sourire parce que je savais que le "Tango criminel était kitsch. Mais que mon frère eut choisi d'après son goût personnel et n'eût pas simplement cédé devant la censure d'un bon goût exsangue et théoriquement juste, que son choix fût plus spontané et, au sens le plus vrai du terme, plus juste, je ne devais m'en rendre compte que bien des années après...".<br /> Ceci laisse supposer que le jeune frérot sut sans doute sauter par dessus les barrières des convenances et qu'un témoignage de sa part pourrait effectivement ressembler à "Je m'en suis bien sorti, moi, alors pourquoi pas lui ?" Comme vous l'écrivez, tout est possible !
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D
En effet, l'existence de ce frère, que j'ignorais (ou que j'ai oublié), me fait rêver, comme IchVersteheZorn, à un second témoignage, mais qui risque d'être déroutant.<br /> En effet, loin de nous raconter comment, lui, il a pu éviter le lymphome, ce frère va peut-être, comme les sœurs de Chateaubriand, nous dire en substance, et avec sincérité, qu'"il ne faut pas exagérer, quand même !".<br /> Tout est possible...
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I
Fritz avait sans doute raison pour ce qui est du lymphome constitué par les "larmes rentrées", n'en déplaise aux chercheurs et médecins qui n'aiment pas que les malades fassent eux-mêmes leur diagnostic... <br /> En ce qui concerne son histoire, il serait intéressant de savoir comment son jeune frère s'est sorti de cette éducation mortellement bourgeoise. Fritz étant né en 1944, son jeune frère doit être né fin des années 40 début des années 50 et doit donc avoir à peine la soixantaine : son témoignage serait intéressant (à moins que son vécu personnel et ses convictions l'en empêchent...). Si ton frère ne peut parler, trouve un bon médium et reviens nous raconter la suite, Fritz !
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