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Mots et Images
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3 juillet 2013

Mange, prie, aime, d'Elizabeth Gilbert

mange_prie_aimeUne trentenaire est en train de "prendre les douze kilos les plus heureux de [sa] vie" à Rome. C'est le début du voyage initiatique d'une femme blessée et pleine d'humour à la fois.

Nous retournons dans son passé : écrivain, divorcée parce qu'elle comprend qu'elle n'est pas prête à être mère et qu'elle étouffe dans son mariage, laminée par une liaison passionnelle avec un homme qui lui souffle le froid et le chaud, elle a été en proie à une dépression importante.

Mais il reste plusieurs lueurs en elle : sa foi, son amour de la langue italienne et sa passion des voyages. Sans compter une prédiction faite par un Indonésien qui semble parler d'avenir radieux. C'est à ces lueurs qu'elle se raccroche.

Première étape, Rome, donc, et sa recherche sans culpabilité du plaisir et du farniente... Ensuite, un ashram d'Inde et Bali...


C'est un roman qui m'est arrivé en bookring (le livre circule de lecteur en lecteur avant de revenir à celui qui a lancé ce cercle). J'ai très vite compris qu'il allait compter pour moi (envie de copier chaque page pour en mettre une citation sur ce blog) avec la sensation parasite de tous les lecteurs auxquels j'allais le faire passer... Bref, il fallait que je le rachète, histoire de ne pas le retenir plus longtemps et le faire lire autour de moi.

La narratrice, censée être l'auteur, raconte avec un véritable don de sympathie ses souffrances, ses erreurs, ses échecs, mais aussi cet appétit de vivre et ses dialogues spirituels intérieurs, la quête de la méditation. Le mot "roman de plage" (employé par deux de mes collègues) me paraît très sévère, même si le niveau littéraire n'est pas élevé, j'en conviens, la construction humoristique, les analogies désopilantes faites par l'auteur n'en font pas une lecture anodine, ni même de la chicklit. Il y aurait pourtant des points communs avec ce sous-genre : une héroïne en début de trentaine, qui se dévalorise avec beaucoup d'auto-dérision, d'humour, un final en feu d'artifice rose et bain d'optimisme. Les aller et retour entre romantisme patriarcal et nécessité humaniste d'égalité et de réalisation personnelle autant que collective signent aussi cette quasi-appartenance.

Mais en réalité, à ma grande (et désagréable) surprise, c'est un texte autobiographique ! Désagréable, car l'originalité des situations et dialogues n'a plus à être mise au crédit de son talent littéraire mais à quelques traits sur du papier calque sur sa vie. Soit dit en passant, si l'histoire de Wayan est vraie... je suis gênée qu'elle parle du problème dont il est question vers la fin... Elizabeth Gilbert croit-elle que Wayan n'aura jamais entre les mains le livre qui parle d'elle ? Wayan sait l'anglais et elle sait lire, que diable !

Une autre différence de taille avec la chicklit, ce sont les épisodes tragi-comiques qui ne vont jamais jusqu'à la farce, ni la caricature, et creusent en profondeur la vraisemblance de l'expérience, au point qu'ils ont tous trouvé de l'écho dans ma propre vie. Même les épisodes mystiques, fort éloignés de mon histoire personnelle, notamment parce que les deux pires tartuffes que j'aie rencontrés étaient des Occidentaux convertis au bouddhisme, m'ont séduite. J'étais loin des Phrases bourrées de majuscules dont ces Chercheurs de Transcendance croient profond d'orner leur Chemin de Vie... Ouf !

D'ailleurs, prudence, sincérité, ou conseil de son éditeur, elle ne prétend pas que les perceptions reçues lors de ses rêves ou de ses méditations soient d'authentiques Messages d'Êtres de Lumière (comme diraient mes tartuffes manipulateurs) mais n'exclut pas, loin de là, qu'elles soient des soins d'amour venant d'elle-même pour elle-même, ce qui serait déjà bien.

A ma grande surprise, ce qu'elle dit de l'Italie et de Rome est loin d'être cliché, même quand ça en a l'air et elle présente de manière synthétique autant qu'exacte des aspects culturels très intéressants... sur le sujet, je l'attendais au tournant !

Elizabeth Gilbert n'idéalise ni les êtres, ni les pays traversés, ni ne grave dans le marbre la sérénité et le bonheur acquis à la fin du livre mais leur rend grâce, avec simplicité. Une belle rencontre.

Citations :

  • Le lendemain, en méditation, toutes mes vieilles pensées haineuses et corrosives sont de retour. Je ressasse mon divorce, la souffrance que m'a infligée ma vie conjugale, toutes les erreurs que mon mari a commises, puis - ce sujet sombre étant au point de non-retour - je commence à ressasser mon histoire avec David...
  • Personnellement, ce mot même de "détachement" me pose problème : j'ai rencontré des gens en quête spirituelle qui semblent déjà totalement déconnectés, émotionnellement parlant, des autres êtres humains, alors quand je les entends gloser sur la poursuite sacrée du détachement, j'ai juste envie de les secouer et de leur crier : "Mon pote, c'est la dernière chose à laquelle tu as besoin de t'exercer !"
  • Même dans les pires crises et tragédies, il n'y a pas de raison d'ajouter un malheur des autres en étant soi-même malheureux.
  • "Un bon mari féministe, dit-il, je voulais être du côté correct de l'histoire sociale."
  • "Pour une raison qui m'échappe, j'éprouve pour toi ce que j'éprouvais pour mes enfants quand ils étaient petits : je me disais que ce n'était pas leur boulot de m'aimer, mais le mien de les aimer."
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Commentaires
D
Celui-ci est déjà dans ma Pile à Lire et tu me confirmes qu'il est impératif de le lire ! Merci pour ce billet !<br /> <br /> Mes Instants Lecture
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